jeudi 2 août 2012

Nick Drake - Pink Moon

Peut-on juger un album sur sa longueur? Certains critiques ont ces temps-ci une malheureuse tendance à le faire. C'est à mon avis une ineptie. Prenons Pink Moon. Chef d’œuvre s'il en est, claque instantanée de pur folk, sans rien à jeter, le tout en moins de 30 minutes. On imagine mal aujourd'hui qu'une note ait pu être ajouté à ce monument de la musique, qui est très bien comme il est. Moins de 30 minutes, oui, mais pour une plénitude tellement folle qu'il serait sot de bouder notre plaisir.

Critique de l'album

Concrètement, pour ceux qui ne connaissent pas encore cet album (et malheureusement ils sont trop nombreux), Pink Moon est le 3° album d'un songwriter anglais, qui enchaina échecs commerciaux et dépressions avec la précision d'une horloge suisse. Malgré tout, il sort en 1972 cet ultime album (il mourra à 26 ans d'une overdose médicamenteuse), une sorte d'apogée de son art. Les précédents albums étaient déjà de véritables perles de folk, avec de superbes arrangements, visiblement inspiré par Van Morrison (on peut comprendre), mais il se dépouille complètement sur Pink Moon, où il se retrouve seul face à sa voix et sa guitare (et un piano sur le titre éponyme qui sert d'ouverture à l'album).
Ce dépouillement musical est aussi un dépouillement de l'auteur-compositeur-interprète qui semble se livrer sur chacun des 11 titres qui composent l'album. Sa voix est bien celle d'un jeune homme, mais elle trahit aussi le fait qu'il semble avoir déjà bien trop vécu, elle évoque celle d'un homme d'expérience. On pense parfois à Tim Buckley dans la façon de chanter. A l'écoute des chansons, on se laisse complètement aller dans un monde dépouillé mais jamais désert, car la voix du bonhomme a, malgré la mélancolie évidente que l'on ressent au premier abord, une certaine chaleur, une façon d'habiter l'espace qui rend heureux. C'est cela la magie de Nick Drake, celle de faire surgir des sentiments apparemment contradictoires, mais finalement complémentaires.
La guitare est simple, mais non simpliste, acoustique et joliment maniée, faisant tourner en boucle des riffs folk desquels Drake s'entoure pour raconter la vie. Car on ne ressent pas dans cette musique la création d'univers ou de rêves, on ne ressent que la vie de l'auteur. Un homme seul, mais qui avait en lui la volonté d'aimer, car il y a une sorte de romantisme dans les chansons de Nick Drake.

Critique de l'album

Voilà en tout cas un album qui ne devrait pas manquer d'enthousiasmer tous les amateurs d'Elliot Smith ou Keren Ann, chez qui on ressent une filiation immédiate. On apprend aussi de façon plus surprenante que les Cure et Mars Volta ont été inspirés par cet immense petit artiste, et puis finalement non, rien de surprenant, quand on raconte aussi bien la vie, quelque soit le style, on ne peut qu'être admiratif. 28 minutes qu'on écoute en boucle car il y a plus de substance à absorber et de beauté à découvrir dans ces 28 minutes que dans la carrière entière de certains artistes.

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