mardi 11 décembre 2012

Eels - Electro-Shock Blues

En 1996, Eels se dévoile comme un groupe talentueux, porté par un single imparable: Novocaine for the soul. L'album qui s'ensuit est d'une très belle facture, parfaitement dans l'air du temps, très rock, avec des ajouts électro, soul, bidouillages et autres plaisirs à la Beck. En 98, Mr E revient avec Electro-Shock Blues, utilisant des recettes assez similaires, mais en allant beaucoup plus loin.

Critique de l'album

Beaucoup plus personnel, E sort d'une période de deuil et a vu ses proches affronter la maladie, en tant qu'artiste, il ne pouvait pas se priver de relater ces événements. D'où des titres aussi joyeux que Elisabeth on the Bathroom Floor, Cancer for the Cure ou Going to your Funeral, aux paroles déprimantes à souhait, mais la musique renvoie en permanence une image plutôt colorée, si bien que l'ensemble forme un tout extrêmement ironique. C'est un des sentiments les plus forts transcrits dans l'album: l'ironie de la vie. Certains noteront qu'un des meilleurs albums des années 2000 a aussi été marqué par le deuil, je parle bien sûr d'Arcade Fire. Sujet vaste, qui confronte chacun à la disparition de l'autre et à sa propre disparition, et qui semble inspiré les artistes avec une force et une conviction incroyable.
Au cours des années 90, un petit génie, branleur de formation, a transformé la musique, apportant ses connaissances folk et appliquant les rythmiques hip-hop, Beck a décloisonné la musique du début de cette décennie, donnant des ailes à d'autres, dont Eels, profondément pop-folk, plutôt orienté ballades (Ant Farm, country-folk), qui a lâché les productions classiques pour faire des chansons qui ne sont qu'à lui, avec des ajouts de jazz (Hospital Food), de trip-hop (Efil's God) ou d'instrumentation plus classique (PS You Rock My World, superbe façon de conclure l'album). Et puis, il y a la construction des morceaux, comme Last Stop This Town (sans doute la meilleure chanson de l'album), qui commence comme une ballade au clavecin, avant de prendre des tournures inattendues, à coup de rythmique hip-hop, de yeah!, de voix angéliques et de guitares saturées. Et le pire, c'est que la sauce prend super bien.
Et puis, il y a la voix de Mark Oliver Everett, joliment déchirée, comme si le bonhomme faisait partie d'un groupe de hard, mais qui trouve parfaitement sa place dans cet univers pop. Elle ajoute la touche grunge, qui sied tant à l'époque, et qui fait part de l'énervement de l'artiste face à la mort. Mais elle sait aussi se faire sensible et émouvoir quand il faut, comme sur Climbing To The Moon, véritable morceau à la Beatles, où E montre qu'il n'est pas John Lennon ou Paul McCartney vocalement, mais il met tellement ses tripes dans la chanson qu'on ne peut qu'adhérer à son propos.

Critique de l'album

Bref un album qui n'a pas pris une ride, et qui s'écoute encore aujourd'hui avec un plaisir mêlé de tristesse, une grande mélancolie en somme, en se disant qu'on a peut-être à faire avec un des meilleurs albums pondus pendant la décennie 90s (et pourtant ils furent nombreux), qui n'a pas à rougir (mais à rosir quand même) à côté de Homogenic et autres OK Computer. Par la suite, Eels continuera à sortir de bien beaux albums, aux sonorités variées, mais aucun ne mêle avec autant de bonheur volonté d'innover et sincérité.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Et vous, vous en pensez quoi?